Fates Warning - Darkness in a Different Light
Inside Out Music

Depuis que Fates Warning compte Ray Alder (chant) dans ses rangs, le groupe newyorkais a pris une nouvelle dimension. Le temps de la scène Thrash (qu’elle ait été newyorkaise ou californienne) est déjà assez loin ! Car le chant de Ray Alder marque une véritable rupture avec ces temps où des formations comme Exodus ou Overkill faisaient la loi.

Ray Alder est clairement beaucoup plus dans l’émotion et la mélodie. Et cette couleur vocale sied à merveille à cette formation (qui à fortement inspiré Dream Theater à leurs débuts il faut le dire). Car Fates Warning a évolué, a mûri. Cet album est le premier depuis presque dix ans. Autant vous dire que les amateurs de ce groupe (dont je fais partie) commençaient à s’impatienter. Autre petite révolution interne (qui elle aussi a plus ou moins coïncidé avec l’arrivée de Alder) : l’orientation du groupe vers un côté industriel qui se traduit entre autres par des guitares que ne renieraient pas Trent Reznor( Nine Inch Nails) ou Al Yourgensen (Ministry). Ce ne sont là que quelques éléments qui sont devenus manifestes sous l’ère Ray Alder. Jim Matheos (cerveau du projet) a multiplié les collaborations au cours de la première décennie du troisième millénaire avec des musiciens comme Mike Portnoy ou Kevin Moore (OSI).

Le projet OSI a ceci de commun avec Fates Warning ce côté indu. C’est à se demander si Fates Warning a encore des points communs avec Dream Theater. Certainement une rythmique complexe. Mais aussi un chanteur étant à même de procurer une large palette d’émotions. Et, justement, des compositions et musiciens capables de rendre des ambiances particulières.

Pour ce qui est de ce qui nous est proposé musicalement sur cette galette, le titre d’un album de Joe Satriani me vient à l’esprit : Strange Beautiful Music. La musique de Fates Warning « Post Disconnected » est clairement un poil sombre. On a même l’impression d’être projeté dans une dimension parallèle avec cette musique. On dit parfois que la musique est imagée. C’est-à-dire que l’on peut imaginer des scènes ou des images à son écoute. Et bien ici, la musique ne peut qu’induire une série d’images dans votre esprit. Une atmosphère en fait qui reste le lien le plus évident entre sonorités et images.

Le premier morceau One Thousend Fires nous propose une intro très explosive. Et fortement encline guitares. Explosive et très « speed » mais cependant entrecoupée de passages plus calmes. Ces parties se limitent (presque) en des guitares folk (ou classiques avec effets de type échos) comme le Metallica des années 80 pouvait nous concocter. La rythmique de Bobby Jarzombek se veut complexe. Jim Matheos n’est pas qu’un fabuleux guitariste rythmique. Il peut si besoin est délivrer des solos impeccables et dignes d’un John Petrucci. Même si un certain nombre d’entre eux sont assurés par l’excellent Frank Aresti. La structure de ce morceau n’en est cependant pas brouillonne. Du pur plaisir !

Structure des morceaux présentant différents segments et donc des variations rythmiques manifestes. Et tant qu’à évoquer la performance de Bobby Jarzombek, quoi de mieux que d’enchaîner sur Firefly. A coup sûr un des « Highlights » de cet album. Bobby Jarzombek s’y exprime pleinement. Les guitares sont saturées tout en restant raisonnablement posées (FW n’est pas Venom quand même). Solos impeccables. La section rythmique emmène guitares et chant dans son sillage.

Avec Desire, Matheos nous propose des effets sur ses guitares avec toujours cette ambiance semblant dépeindre un monde futuriste (peut-être quelque peu déserté en âmes humaines) Ces ambiances étaient déjà présentes sur l’album Disconnected. Album Disconnected d’où I am semble tout droit sorti. Un grand Ray Alder sur le morceau doublé d’un Jim Matheos en grande verve. L’intro à la basse est annonciatrice de quelque chose de spécial. Viennent alors batterie et guitares se joindre à la fête. L’urgence de cette composition nous prend aux tripes. Du grand Fates Warning ! Digne d’un groupe qui a gardé son style contre vents et marées. Tout en évoluant bien sûr ! Ce morceau est entrecoupé de passages plus calmes qui soulignent ceux plus pêchus. Les points communs avec l’album  disconnected sont nombreux. Preuve s’il en est que cette réalisation a été fondatrice d’une deuxième vie pour ce groupe talentueux.

Lighthouse est le morceau par excellence qui dépeint les ambiances décrites plus haut. Et on se dit alors que nul autre « Frontman » qu’Alder n’aurait pu assurer le chant sur pareille peinture sonore.

Avec Into the black la preuve nous est donnée que Fates Warning ne navigue jamais bien loin de Dream Theater. Morceau pêchu et ô ironie : une intro « à la Rudess » (qui rappelons-le a succédé à Kevin Moore et Derek Sherinian au sein de Dream Theater).Et lorsque l’on sait la proximité de Moore avec Fates Warning, on se dit que les deux groupes ne possèdent pas tous ces points communs par hasard.

Nous atteignons le point le plus sombre de ce recueil avec Kneel and Obey. On se surprend parfois à penser à du Machine Head ou parfois à du Pantera. Une nouvelle facette que nous font découvrir ces dieux yankee du métal dit cérébral. Et si on n’a pas peur des comparaisons osées, on pourrait même se surprendre à penser à du Alice in Chains.

Les pionniers du « Prog Metal » ne sont pas que des précurseurs. Leur carrière se conjugue également au présent. Leur énergie reste intacte. Et ce n’est certainement pas O Chloroform qui viendra me contredire. Encore une tuerie ! Rythmiques toujours aussi complexes. Et surtout, ce qui maintenant peut être considéré comme une constante sur cet album : FW arrive à mêler ambiances et tripes, atmosphères et explosivité. Et tout cela avec un sens de l’esthétique sans pareil.

Pour clôturer l’album comme il se doit, le quintet dont la genèse peut être (géographiquement) localisée dans le Connecticut nous propose And Yet it Moves. Guitares classiques en intro puis très rapidement on revient à du métal (très) technique. Et surtout un sens du riff imparable dont peu de guitaristes ont le secret (pensons à Tony Iommi qui excelle dans le dernier Sabbath). La guitare nous propose (en plus de la désormais classique rythmique presque saturée), un déferlement de notes tout en progression. Métal progressif vous avez dit ? Oui Monsieur !

Cet album est la première réalisation de Fates Warning depuis 2004. La première constatation est que le style reste proche de ce qu’il était en 2004. Les membres clé sont toujours là. Le style est donc renforcé (ou rôdé). Les compositions sont toutes très réussies. Mais aussi assez variées. Preuve s’il en était que la formation est consciente de la force de son identité et n’hésite donc pas à décliner sa musique sous de multiples facettes. Fates Warning se renforce donc en tant que Fates Warning ils nous offrent bien un album dont la qualité est à la hauteur de la longue attente.

Du tout bon Fates Warning !

Ignacio