Def Leppard - Mirror Ball (Live & More)
Frontiers Records

Il existe des groupes qui sans le faire exprès cultivent le symptôme des laboratoires Muppets où l’avenir appartient déjà au passé. Et le quintette anglais DEF LEPPARD fait partie de ceux-ci à l’insu de son plein gré. Non pas que le groupe ait quoi que ce soit à se reprocher. Que du contraire, ayant vu le jour à la fin des années ’70 à Sheffield en Angleterre, et de ce fait, il fit partie des fers de lance de ce qu’on a finit par appeler la New Wave Of British Heavy Metal, aux côtés de SAXON, IRON MAIDEN, MOTÖRHEAD et quelques autres. Pratiquant un hard rock particulièrement savoureux, le groupe sort On Through The Night en 1980, High’n’Dry en 1982 puis Pyromania en 1983. Le groupe connaît ainsi un succès phénoménal en ses propres contrées et surtout aux USA avec leur troisième galette qui se vend à plus de 7 millions d’exemplaires.

Fin de l’année 1984, le batteur Rick Allen perd son bras gauche. Mais cela ne l’empêche pas de rester dans le groupe grâce à une batterie spécialement configurée pour lui. Admirez au passage, le fait qu’il soit, plus de vingt ans après l’accident qui l’a handicapé, toujours dans le groupe. En 1987, c’est le jackpot, leur album Hysteria atteint le score de 17 millions d’exemplaires vendus. Mais le sort s’acharne sur le Léopard Sourd, le guitariste Steve Clark décède suite à un mélange d’alcool et de médicaments. Le guitariste de Ronnie James Dio sur les albums Holy Diver et Last In Line Vivian Campbell rejoint alors le groupe. S’ensuit un album extraordinaire : Adrenalize en 1992 dont les ventes atteignent aussi les 7 millions. S’ensuit un album de titres jamais édités ou remis au goût du jour Retroactive.

Et puis patatras, c’est la vague grunge qui emporte tout sur son passage et les groupes de Metal boivent la tasse. DEF LEPPARD ne fait pas exception. Il poursuit sa route mais ne connaîtra plus jamais la gloire des débuts. L’album Slang en 1996 porte trop l’emprunte ‘grunge’ comme si le groupe avait renié ses origines, il ne se vend qu’à 2,2 millions d’exemplaires. Même si c’est assez considérable, c’est aussi une chute assez vertigineuse. La suite est du même acabit. Le quintette britannique enchaîne en 1999 avec Euphoria qui marque une légère tentative de retour au vrai visage du groupe. Mais la galette sobrement intitulée X qui suit en 2002 ne convainc pas outre mesure. Pour preuve, le groupe replonge alors dans les reprises avec Yeah ! en 2006. Il faut attendre 2008 et Songs From The Sparkle Lounge pour entendre les fans rugir de plaisir au cri de « The Leppard is back » et de faire à nouveau tinter le tiroir-caisse.

Aujourd’hui, c’est un groupe en plein forme qui revient avec un best of live du meilleur effet.

Le groupe ouvre les hostilités avec Rock Rock (Till You Drop) et on sent que tout est toujours aussi efficace : Rick Allen a toujours une rythmique d’enfer (avec un seul bras ne l’oublions pas), la basse de Rick Savage s’avère toujours aussi bourdonnante et deux guitares se complètent magnifiquement. Le chanteur Joe Elliot s’avère particulièrement en voix et ce vieux titre n’a pas pris une ride. Les deux solistes Vivian Campell et Phil Collen s’en donnent à cœur joie et c’est du bonheur que d’entendre qu’ils ont toujours la pêche. Avec Rocket et Animal, le groupe joue la sécurité en offrant au public les titres issus de son stock de chansons les plus efficaces et les plus connues. Notez qu’on ne s’en plaint pas. Replonger dans de tels hymnes représente un bain de jouvence assurée. Difficile de rester de marbre, les pieds battent la mesure, la tête se secoue allègrement et les doigts ont tendance à défiler le long d’un manche imaginaire.

Après cet extraordinaire retour sur le glorieux passé, le plus récent C’mon C’mon (album Songs From The Spark Lounge) n’arrive pas à susciter la même adhésion. Et ce n’est qu’à force de répétition, que le titre finit par renter dans la tête, nul doute que comme un bon vin, il faut le laisser vieillir un brin. Gros hurlements de la foule pour Make Love Like A Man qui marque un retour aux années de gloire. Les musiciens sont en forme et ça s’entend, tous se jettent dans le chant de façon conquérante lors des refrains. Imparable !! Petit intermède où le chanteur s’adresse à la foule pour lancer un Too Late For Love dont le mid-tempo et les interventions de guitares font autant merveille en live qu’en studio. Autre botte imparable : Foolin’ qui n’a pas pris une ride, la montée d’adrénaline est assurée à chaque refrain et difficile de rester insensible au solo. Retour à Songs From … avec Nine Lives, titre qui s’inscrit totalement dans les années de gloire du groupe. Le titre montre que les musiciens ont à nouveau été touchés par la grâce, qu’ils ont retrouvé leurs marques et ça fait du bien.

Introduction éthérée pour la ballade Love Bites, le groupe calme le jeu. Mais les gros riffs ressortent d’autant plus dans ce tempo lent. Même genre de démarrage pour Rock On qui engouffre le concert dans un gros délire psychédélique. Inattendu, étrange de voir le groupe faire une reprise (qui figure sur l’album Yeah) mais pas désagréable. Poursuivant dans une veine plus calme, les musiciens enchaînent avec Two Steps Behind, l’électricité est partie en vacances et les oreilles du public se reposent. Cette séance de thérapie par musique calme se poursuit avec Bringin’ On The Heartbeat. Le public est invité à participer et ne se prive pas, DEF LEPPARD sait quand faire monter la sauce : le titre se termine en apothéose. C’est jeu, set et match.

Passé cette pause, les Anglais vont laisser toner l’artillerie lourde. Et ça fait mal : l’instrumental Switch 625 est l’amorce des bombes qui vont suivre. Ce titre est un bijou méconnu, mais impossible de rester de marbre face à un tel chef d’œuvre qui pourrait servir de générique à toute émission de Metal digne de ce nom. Que ce soit Vivian Campell ou Phil Collen, les guitares sont à la fête, du vrai bonheur. A moins d’être dans le coma (et encore), impossible de ne pas se secouer à l’écoute d’une telle claque. Les rugissements du public en sont la preuve. Sans coup férir, Hysteria prend la relève pour le plus grand bonheur de la foule. Et Joe Elliot d’adresser un vibrant ‘Are You Ready’ aux fans avant que le groupe ne se lance dans un Armageddon It irrésistible, suivi par un Photograph tout aussi explosif et un Pour Some Sugar On Me retentissant, et probablement mortel à trop forte dose. Le genre de trio qui vous laisse pantois et vidé de toute énergie. Ces plages déjà bien efficaces en version studio, arrachent un maximum en Live. Rayon soli, c’est l’apothéose, le mixage du live met en évidence le son tranchant des guitares.

Malgré les années qui passent, le quintette tient la forme et le prouve avec un Rock Of Ages assené au public sans prévenir. Après un très léger break, c’est Let’s Get Rock qui met le feu aux poudres. Le groupe explose, le public aussi. Le chanteur dit au revoir au public, mais c’est sans compter les rappels que sont la reprise de FREE : Action, tirée de l’album Retroactive. En public, le titre prend une dimension supplémentaire. Bon, en son temps, j’avais trouvé la reprise fait par leurs concitoyens de RAVEN plus pêchue. Mais ici, c’est la claque assurée. Et ce Live s’achève sur un Bad Actress issus de Song From The Sparkle Lounge, titre qui confirme que le groupe a retrouvé toute sa superbe.

Comme cadeaux bonus, trois nouvelles plages extraites du prochain album studio, titres qui confirment la bonne santé du combo britannique. On trouva ainsi un Undefeated bien carré, rempli de joyeux riffs et de chœurs, avec des guitares magistrales. L’introduction de Kings Of The World fait référence à la fois à QUEEN et aux BEATLES, deux pointures du rock anglais. Le reste du morceau ne nie pas ces influences importantes dans l’histoire des musiciens. Le son piano fait un drôle d’effet après l’écoute de tous ces titres Live, mais le titre fait plus que simplement tenir la route. Pour sa part, It’s All About Nothing confirme que le groupe sait toujours varier les titres en conservant sa touche, même si cette plage-ci lorgne très fort vers le Metal commercial.

En conclusion, même s’il puise allègrement dans son glorieux passé pour la scène, la palette des titres interprétés le montrant clairement, cette galette permet d’envisager un futur plutôt radieux pour DEF LEPPARD et il le prouve, en laissant la part belle à quelques titres de son dernier album studio (et en annonçant le suivant), faisant judicieusement l’impasse sur sa période plus creuse. Non, le félin n’a pas encore perdu ses griffes.

Mr Spok