Fabuleuse découverte que ce groupe canadien. A peine deux albums au compteur, mais déjà une troisième galette en préparation. Et de nombreux mouvements au sein de la formation, Sterling Burrows le bassiste qu’on entend ici a déjà mis les voiles remplacés par Ryan King (voir interview par ailleurs). De la formation de la première heure, ne reste que le batteur Tim Prevost et le guitariste John Simon Fallon. Mais ceci ne nous empêche pas de savourer ce menu particulièrement épicé.
La plage titulaire ouvre les hostilités avec un tempo lourd pour une voix hyper éructée. Le contraste sera forcément flagrant lorsque la chanteuse Amanda Kiernan optera pour un timbre nettement moins agressif lors des passages plus lyriques. Et si le chant se veut hyper agressif, on comprend les paroles. Les deux guitaristes John « Simon » Fallon (au sein du groupe, les autres musiciens ont pris l’habitude de l’appeler par son deuxième prénom pour éviter les confusions) et John Saturley s’en donnent à cœur joie et ne prennent la proéminence que lorsque c’est leur tour. Le groupe ne fait pas de quartier, le riff possède un air de prog mais n’est pas là pour nous prendre la tête, ça cogne sec et ça riffe dur. Avec les variations de la voix, difficile de croire qu’il n’y a qu’une seule personne derrière le micro, c’est Infirmière Jeckyll et Miss Hide. Une accélération générale et le solo éclate. Comme entrée en la matière, c’est un coup de maître.
Sans arrêter la machine, le quintette nous assène alors le titre éponyme du groupe. La voix se fait moins hurlante, la musique opte pour une mélodie lancinante. Cette fois-ci, ce sont les accélérations lors du refrain qui se branchent sur les hurlements, la technique inversée de la première plage en quelque sorte. Sans jamais se départir de cette rythmique assassine et de ces riffs acérés qui connaissent de nombreuses variations, The Order Of Chaos démontre que les deux six-cordes possèdent des idées en réserve.
Et voilà d’autres riffs éclatants qui débarquent sur Hell Is Forever. La batterie se déchaîne, le titre semble prendre des détours plus commerciaux avant que le chant ne remette les pendules à l’heure et ne reprenne une tangente plus agressive. Petit détour par l’Egypte avec Chaos In Cairo, le genre de plage qui pousserait tout un peuple à la révolution si ce n’était déjà fait. A nouveau, on constate avec bonheur que le groupe a le sens du riff et sait toujours y ajouter quelques finesses qui augmentent l’impact du titre. Le duo rythmique se lance dans l’exercice du super carré pour lancer For Another Moment. On nage en eaux assez commerciales mais dans le genre, ce titre bénéficie d’une efficacité redoutable, car même malgré son positionnement à la suite des tueries précédentes, il ne souffre d’aucune baisse de tension tellement il regorge d’énergie. Le solo, pour sa part, s’avère également royalement flamboyant. Qu’on se le dise THE ORDER OF CHAOS est à l’aise dans tous les registres et ce avec un brio qui frise l’insolence.
A ce point de notre voyage, The Dark Lord récupère le chant agressif sur un rythme rapide sans être effréné. La plage se fait lancinante mais reste captivante par de magnifiques gammes ascendantes et descendantes qui annoncent un double solo. Ces mêmes gammes seront reprisent après le solo pour fermer la page du chapitre principal et lancer l’intermède acoustique qui ouvre la voie à un passage assez gothique. Plus de huit minutes de magie.
Le groupe appuie alors sur l’accélérateur pour End Of An Era. Les richesses de la composition s’avèrent identiques à celles qui nous ont déjà émerveillés : rythmique à la nitroglycérine, guitares survoltées et voix déchaînées. La bande nous plonge alors dans une ballade à la METALLICA unplugged avec Torturer’s Apprentice. Mais ce ton mou est rapidement abandonné et les gaillards relancent la machine et les distorsions. Ce mid tempo énergique fait merveille, à nouveau le groupe arrive à surprendre, le titre s’achève sur une magnifique accélération tout aussi efficace que le reste. Le Guns’n’Order qui clôture l’album plonge lui aussi dans des eaux plus commerciales mais avec bonheur tellement c’est énergique, efficace et bien foutu.
Les Canadiens réussissent donc l’exploit de nous livrer un album direct qui s’écoute d’une traite, sans jamais lasser, chaque titre suscitant autant d’intérêt que le précédent. Les atouts sont évidemment les deux guitaristes virtuoses parfaitement complémentaires, une chanteuse à la présence magique (et sur scène c’est encore mieux) qui peut moduler sa voix dans tous les registres et une section rythmique tout aussi efficace que discrète, n’oubliant cependant jamais de glisser de-ci, de-là de judicieuses subtilités. Rien que du bonheur, quoi.
Mr Spok