Pour célébrer un onzième album et 25 années d’existence, les Danois, mettent les petits riffs dans les grands plats : un double album, dont le deuxième regorge de titres acoustiques et live. On les avait un peu perdus de vue et voilà qu’ils nous remettent le couvert. Quelque part leur bonne humeur et la simplicité efficace de leur musique nous avait manqué. Loin du rock symphonique ou progressif, c’est à un retour à l’essence même du rock que nous convient les joyeux lascars de D.A.D (pour Disneyland After Dark, mais vous comprendrez que lorsqu’ils se sont fait signer sur un grand label américain, ils ont préféré faire l’impasse sur l’explication de leur acronyme). Et si vous lisez le titre de l’album d’une traite, tout devient plus limpide.
Depuis leurs grands succès à la fin des années ’80, le groupe avait poursuivi dans l’ombre une carrière qui s’avérait prometteuse, puisque le groupe passait sur MTV avec des clips délirants et des morceaux d’enfer.
Quel bonheur de retrouver la voix à la fois chaleureuse et un rien gutturale du chanteur Jesper Binzer. Reconnaissons-le, d’emblée, malgré ces joyeux, débuts, passées les premières secondes, c’est un peu la déception. Le A New Age Moving In nous laisse un rien sur notre faim au niveau du riff. Heureusement que la voix sauve les meubles. Le groupe enchaîne sur un tout aussi carré I Want What She’s Got où les chœurs répondent au chant principal. Les deux guitares (le chanteur et son frère Jacob) riffent toujours autant, mais le constat est là. Le son de la distorsion, rude, à la limite un rien bourrin, donne un aspect trop cracheur aux riffs qui auraient gagné à avoir un tantinet plus de limpidité. Cependant, même séduits à dose réduite, nous sommes bel et bien dans l’univers D.A.D.
A nouveau un titre assez classique, avec ce son de guitare trop brut, The End. Le groupe réussit à créer une chouette ambiance, avec un break judicieux, le tout en moins de quatre minutes. Surprise, le son de Fast On Wheels se veut plus clair, la plage lorgne vers le punk-rock anglais de la fin des années ’70 et dans le genre c’est une chouette réussite. Petit ambiance Sabbathienne pour l’intro de The Place Of The Heart avec un riff plus lourd et lancinant.
Gros bourdon de basse pour lancer Last Time In Neverland, puis surgit un riff bien sec dont le groupe a le secret, et avec la voix du chanteur on marche à fond sur ce mid-tempo énergique et revitalisant. Un autre mid-tempo plus mélancolique avec Breaking Them Heart By Heart. Bon soyons clair, c’est du déjà entendu de la part de D.A.D., mais la conviction est toujours présente et finalement on marche, l’ensemble nous séduit.
Petit détour par la case ballade avec We All Fall Down de tendance « sortez vos mouchoirs » mais on ne peut s’empêcher de penser à une pointure telle AEROSMITH tellement le titre regorge de puissance feutrée, épuré au maximum, la plage laisse sortir l’énergie à la dose requise sans en faire trop et au bout du compte on est conquis. Ambiance feutrée pour embrayer sur le sympathique Wild Things In The Woods, titre qui s’étoffe petit à petit, mais qui malheureusement traine trop avant d’enfin exploser. Le Can’t Explain What It Means souffre un peu des mêmes défauts, l’alternance passage énergique et moments feutré, casse un peu l’ambiance avant que le titre prenne définitivement sa vitesse de croisière.
Le Drag Me To The Curb ne change pas cette façon de procéder, un gros riff en intro, un couplet feutré et l’explosion au refrain. Mais ce coup-ci, l’énergie déborde vraiment et on ne peut s’empêcher de battre la mesure avec les pieds, les mains et la tête. Du D.A.D. qu’on aurait aimé entendre plus régulièrement quand même. Et ce bel enthousiasme retombe avec la ballade qui clôture l’album Your Lips Are Sealed qui s’avère un excellent remède pour les insomnies, mais à part ça…
Ensuite, c’est un peu une redite de ce qui précède, avec des versions acoustiques et live de certaines des plages (qui figurent donc trois fois sur l’album) qu’on vient d’entendre. Si le procédé permet de voir ce que vaut le groupe en studio, en live et sans électricité. Unplugged, The End nous livre ainsi une ambiance western, avec une guitare au son ‘bottleneck’ pas trop convainquant sur la durée, tandis que l’exécution en public a un son de guitare trop pourri pour bien passer. A New Age Moving In s’en sort mieux sur cette ambiance western et mais également en live, le titre acquérant une pêche supplémentaire, surtout grâce à la voix nerveuse du chanteur, pêche qui fait quelque peu défaut en version studio.
Passons alors à Last Time In Neverland qui prend une autre dimension sans l’électricité, la guitare ressort magnifiquement et donne une autre âme au titre qui du coup en devient mélancolique. Tandis qu’en Live, bien évidemment, ça décape nerveusement. En version simili acoustique, The Place Of The Heart conserver son ambiance sabbathienne, mais possède un petit plus qui flirte parfois avec la ballade eu égard à son tempo lent. Et en live, pas besoin de dire à quel point la référence à la bande d’OZZY s’avère claire.
Le reste de la partie live nous offre un Jihad toujours aussi plaisant, survolté et politiquement incorrect, haa, ce refrain « Jihad I’m getting mad and there’s no fuel left for the pilgrim », plus de vingt ans après, on ne s’en lasse pas et les réactions du public confirment aisément. Le Everything Glows s’avère moins réussi, même si en live, il passe nettement mieux qu’en studio. Heureusement, le Ridin’ With Sue avec son humour décapant fait mouche, impossible de rester de marbre face à une telle gag bombe qui fait référence au classique des SHADOWS Riders In The Sky. Suivent le Monster Philosophy, le We All Fall Down déjà décortiqué, version live quasi identique et tout aussi efficace que la précédente, dommage que le public soit tellement discret.
Le groupe se lâche complètement sur une version rallongée de I Want What She’s Got. Alors évidemment quand le chanteur s’adresse au public dans sa langue natale, ça coince un peu pour les non danois. Mais le public lui ne se fait pas prier pour participer. Si ça passe plutôt bien quand on est dans la foule, sur disque, il manque quand même l’ambiance pour que ce type de titre fasse son effet. Et le tout de se conclure avec God’s Favorite nettement plus nerveux, dommage qu’ils n’aient pas pris un autre titre issus de leur passé pour clôturer.
Bref, les D.A.D. confirment, mais ne surprennent plus vraiment et au niveau de l’album, on devine qu’une production plus poussée aurait pu faire mieux ressortir les instruments pour donner une dimension supplémentaire aux plages. Et même si l’idée de trois versions différentes dans le même emballage peut séduire, à la longue, ça déborde car c’est parfois un peu trop. Ceci étant dit, pour les die hard fans, c’est Byzance et pour ceux qui ne connaissent pas les Danois rigolos, c’est une excellente opportunité de les découvrir. Et mine de rien, quant au final, la dernière plage se termine, la seule chose qu’on a envie, c’est de les voir live, finalement, c’est bien là la plus grande réussite de cette double galette.
Mr Spok