Groupe de speed américain typique des années ’80, SAVAGE GRACE se voit réduit pour son deuxième album à un quatuor emmené par CHRISTIAN LOGUE, le guitariste/fondateur/tête pensante. Il est clair que les changements de line-up ont désorientés les fans et ont brisé quelque peu le parcours de la bande. Car la tournée qui a suivi la sortie de MASTER OF DISGUISE en 1985 est même passée par l’Europe. Mais c’est là que le guitariste a dû prendre en charge la fonction de chanteur, le hurleur MIKE SMITH ayant jeté l’éponge. Et ces changements de line-up vont se poursuivre jusqu’à la dissolution du groupe en 1992.
Sur cette double galette, on retrouve donc CHRISTIAN LOGUE à la guitare et au chant, MARK MARSHALL à la seconde guitare, BRIAN EAST à la basse et MARC MARCUM à la batterie. Dès l’introduction Call to Arms, on devine que le groupe évolue dans le même registre que les premiers albums de SAVATAGE, ce qui représente une certaine évolution par rapport aux joyeux débuts du combo. Mais le groupe n’évolue pas spécialement dans une division équivalente à la bande de JON OLIVA. Ce n’est pas tant faute de talent ou de conviction, mais il manque un petit plus qui aurait permis au groupe de vraiment sortir du lot.
Avec We Came, We Saw, We conquered les bases sont clairement établies : voix haut perchée, riffs bien carrés, duo basse-batterie constante, chœurs faciles à retenir lors des refrains. En clair, un Metal américain bien type des années ’80, mais heureusement pas dans une voie molle et commerciale à la Bon Jovi. Grosse artillerie pour After The Fall From Grace, guitare hurlante et roulements de batterie en introduction ; le chant vient alors se greffer sur un mur sonore terriblement efficace. On ne peut que souligner le choix judicieux de ce morceau comme plage titulaire.
Un des défauts qui ressort avec Trial By Fire, c’est le temps de démarrage réel du titre après une introduction. Dommage car ici le chant se fait largement plus virulent que sur les plages précédentes, et qu’énergie et vitesse sont au rendez-vous, donnant à l’ensemble un petit côté « speed metal » qui rattache SAVAGE GRACE à des groupes tels HELSTAR ou LAAZ ROCKIT. Une plage qui sort vraiment du lot par son déferlement d’énergie.
Petit intermède orientalisant avec Palestini pour lancer un Age Of Innocence qui ne s’embarrasse pas de détail et rentre dans le lard immédiatement, adoptant aussi une orientation « speed metal » toujours bien venue en ces temps de grands froids. On sent que le groupe a enfin pris son envol. Ce que Flesh And Blood confirme par des guitares hurlantes bientôt rejointes par une voix également hurlante et des chœurs du genre courts et costauds.
On ne change pas une formule qui gagne, et c’est à nouveau un riff très hystérique qui ouvre les hostilités pour Destination Unknown. La voix se fait plus posée que sur la plage précédente, et vraisemblablement, le chanteur donne le meilleur de lui-même dans ce registre-là. Le ralentissement opéré par Tales Of Mystery permet de souffler quelque peu. Même si le riff reste énergique, le tempo modéré du titre est surtout insufflé par la façon dont la voix vient se greffer sur l’ossature rythmique. Cette apparente délicatesse permet d’ailleurs au solo de ressortir magnifiquement.
Passons sur le EP RIDE INTO THE NIGHT. Le groupe appuie directement sur l’accélérateur avec Ride Into The Night. Toutes les caractéristiques de SAVAGE GRACE se trouvent à nouveau mixées dans un exemple typique de ce que fut le Speed Metal américain, une plage qui déboule à fond la caisse. A part une introduction plus calme, We March On repose aussi sur le succès des mêmes formules. Court moment de repos avec The Healing Hand qui voit les musiciens se la jouer roublard, car on a l’impression d’assister à l’introduction d’une ballade avant que traîtreusement, ils ne nous submergent de riffs, de roulements de batteries et de soli en fureur qui soutiennent un chant plus modéré que speed. La plage bénéficie aussi d’un break très calme avant que ne reprenne la tempête.
Reprise surprise avec le Burn de DEEP PURPLE. Bon, le fait est que ce n’est pas tout à fait ça. Pour reproduire le doigté d’un Jon Lord ou d’un Ritchie Blackmore, faut se lever tôt, alors même en étant plutôt bon public pour des reprises bien speed, celle-ci ne convainc pas. Dans un autre registre Mainline Love avait été enregistré uniquement pour une compilation : deux plages parfaitement dispensables donc. Autres titres bonus : deux titres captées en public et que le groupe jouait régulièrement lors de ses prestations : Bare Bottom Blues et Such A Dirty Mind. Deux excellents morceaux qui donnent une bonne idée du son du groupe en public, mais qui se différencient quand même largement de ce qu’on entend sur la présente galette, le chant et le ton nettement moins speed en général. Une preuve aussi de l’orientation en girouette que le groupe a prise au fil des années et qui ont empêché l’établissement d’une base solide de fans.
Une remastérisation réussie, certes oui, mais le style du groupe a quand même pris un sérieux coup dans l’aile et tout cela sonne très, trop, années ’80. Pour les inconditionnels seulement.
Mr Spok