La Norvège, pays relativement éloigné du soleil de la Méditerranée, peut également souffler le chaud, surtout quand il s’agit de Metal, il faut dire que dans ces pays nordiques, on s’y connaît en matière de réchauffement de l’atmosphère. Ainsi le quatuor TRIOSPHERE (bon, chipotez pas avec le nom, hein, les mecs de Six Feet Under, ils ne sont que quatre) qui œuvre dans un registre où le mélodique se mêle au symphonique, le tout avec de nombreuses touches de Power et de-ci, de-là, un soupçon de Prog de façon homéopathique pour éviter l’overdose. Vous rajoutez une bassiste au chant et vous obtenez une recette assez particulière mais fichtrement efficace. C’est donc en 2004, que le guitariste MARCUS SILVER BERGESEN et la chanteuse/bassiste IDA HAUKLAND ont posé les bases de TRIOSPHERE. Leur première galette Onwards est sortie en 2006 dans leurs contrées et a envahi le reste de l’Europe en 2007. Quelques tournées en Europe plus tard, aux côtés de pointures telles KOTIPELTO (chanteur de Stratovarius), CHRIS CAFFERY (ex-guitariste de Savatage), KAMELOT, JORN et WASP, le groupe est retourné en studio pour donner un successeur à leur premier opus. Toujours entourés de ORJAN JORGENSEN à la batterie et de T.O. BYBERG à la seconde guitare, les musiciens nous livrent un magistral THE ROAD LESS TRAVELLED. En route pour de Metalliques aventures.
Introduction tout en finesse avec Ignition, la sauce prend lentement, l’énergie se déploie petit à petit avant d’exploser dans un déferlement de riffs et de roulements de batterie agressifs. La mise à feu se termine par une petite touche Prog. Une excellente mise en appétit avant que ne retentissent les guitares de Driven. C’est une grosse rythmique plombée et rapide qui vient soutenir un riff bien sec, avant que des notes plus aigues ne défilent et introduisent la voix de IDA. Cette dernière prend possession de l’espace qui lui est dévolu et la comparaison s’impose pour ceux qui ont connu LEATHER LEONE, hurleuse du groupe CHASTAIN. Pour faire bref et pour mettre les pendules à l’heure, on est dans un registre assez puissant et mélodique mais pas dans un univers tendance opéra à la EPICA ou NIGHTWISH. D’ailleurs, les deux gratteurs évoluent eux aussi dans un environnement plutôt agressif, sec et nerveux que classique. Les interventions des six-cordes sont judicieuses, les roulements de la batterie rajoutent une touche supplémentaire à l’ensemble du titre. Des variations discrètes lorgnent légèrement vers le Prog, sans s’y engouffrer ouvertement. Les deux solistes T.O. BYBERG et MARCUS SILVER rivalisent de talent lors d’un duel de bonne facture, avant qu’un break, où seules la voix et la batterie sont présentes, n’annonce un final bien net et précis.
Une guitare calme sans distorsion ouvre le feu pour Human Condition, accalmie annonçant la tempête. Alors, oui, le rythme est moins rapide que sur la plage précédente, mais l’énergie est bien présente. Oscillant entre les moments de puissance et les passages plus modérés, mais heureusement pas soporifiques, le morceau joue donc avec brio sur les variations d’ambiances. Un solo totalement électrique mais bien lent vient casser le morceau en deux, avant qu’un autre solo impulse une légère accélération du rythme. Puis alors que les guitares se font discrètes, ce sont les vrombissements des fûts qui annoncent le retour de la chanteuse sur un tempo plus marqué, pour un final très bluesy et inattendu.
Le groupe ressert de l’énergie de son stock avec Death Of Jane Doe. Pour votre culture générale, une ‘Jane Doe’ ou un ‘John Doe’, ce sont, dans le jargon américain, des victimes non identifiées d’homicides. Passé cet interlude de criminologie appliquée, revenons à la culture Metallique. Un gros riff lancinant, un martèlement adéquat des fûts, une attaque vocale modérée, une brusque montée de tension, qui introduit un refrain lent.
TRIOSPHERE se joue des ambiances au sein d’un même titre, surprenant l’auditeur là où il s’attend à autre chose. Et puis, gros break qu’on pourrait qualifier de « megadethien » avant que n’éclate les soli agressifs à souhait. Et le titre de se terminer par un dernier couplet qui s’arrête bien net sur un dernier riff.
Quelques mesures de guitare acoustique pour nous introduire Marionette, le riff se fait violent, avant que l’électricité s’efface, pour laisser la voix de IDA prendre la majorité de l’espace sonore. Quelques moments plus tard, l’énergie prend le dessus, l’acoustique a cédé la place aux distorsions, aux gros fûts, et même si le rythme reste plus que modéré, l’énergie est omniprésente. Petit break aux sonorités ‘scorpioniennes’, du genre ballade imparable, un solo tout en finesse avant que l’ensemble ne reprennent du poil de la bête et nous entraîne dans un final époustouflant.
Grosse introduction tendance ‘prog’ pour la plage titulaire, bourrée d’énergie et de finesses. Pendant le couplet, les instruments se font discrets, mais néanmoins inventifs, derrière la voix de la chanteuse, nous offrant un titre à tiroirs qu’il convient d’écouter en trois dimensions, enfin façon de parler bien sûr. Le break avant les interventions des guitares annonce un déferlement magique. Et effectivement, les deux gratteurs possèdent un doigté magnifique parfaitement mis en évidence pendant les soli qui s’éternisent pour notre plus grand plaisir. Et le titre se termine sur l’omniprésence de la voix de la chanteuse. Un excellent choix de plage titulaire somme toute. Après une telle leçon, c’est avec ravissement qu’on se laisse entraîner dans l’univers différent de The Anger And The Silent Remorse et de son intro de guitare acoustique et de touches d’un piano à peine effleurées. Une volée énergétique d’une basse-batterie, guitare en distorsion, suivie par un nouveau ralentissement. Ce type de variation va nous poursuivre, nous offrant un voyage en forme de montagnes russes, tant et si bien que la surprise est assurée à chaque couplet, à chaque refrain, à chaque break. Là où certains auraient conservé une partie pour l’étirer sur un long morceau monotone, TRIOSPHERE mixe des univers différents avec brio, sans nous permettre de souffler. Deux plages qui montrent à quel point le groupe est à l’aise avec des morceaux fouillés.
Plage plus courte, plus directe, riff lancinant pour Watcher. Encore une fois, on constate à quel point les différents instruments viennent souligner la voix de la chanteuse. C’est un break bien carré, qui vient nous balancer quelques notes de guitare éparses avant que ne se déchaînent les doigts des gratteurs, et c’est l’hallali de la six cordes qui s’étend jusqu’à un retour du refrain. Le riff carré nous accompagne jusqu’à la fin, où une note solitaire qui s’étire un rien indique la fin des hostilités. Ce n’est qu’un répit de courte durée avant que n’éclate le gros riff saignant de Twenty One. Plus direct et donc jouant moins sur les ambiances, le titre se contente de tracer une ligne droite qu’il emprunte sans détour et sans craindre l’excès de vitesse. Les guitares et une rythmique solide offrent une voie royale à la chanteuse qui ne se prive pas. Les soli s’offrent une excursion qu’on pourrait qualifier de prog avant la dernière ligne droite qui clôture la plage.
On démarre à nouveau sur les chapeaux de roues pour Worlds Apart qui prend la même direction, mais en encore plus rapide, plus agressif que le titre précédent. Les instruments sont à la fête, à croire qu’ils ont tous forcé sur une réserve d’EPO, tels les coureurs du Tour De France. Un petit break en plein milieu, bourré d’énergie, mais au rythme plus modéré, et un riff qui lorgne du côté de SYSTEM OF A DOWN par la façon dont les roulements de batteries l’accompagnent, une excellente ouverture pour le solo. Lorsque le soliste quitte le devant de la scène, le rythme se ralentit considérablement pour laisser un final au tempo modéré signer la fin des hostilités.
Un instrumental dans la lignée des « hypertechnical guitar heroes » que sont SATRIANI et VAI. Le titre souffre un peu évidemment de la comparaison et franchement, s’il y avait une plage dont on aurait pu se passer, c’est bien celle-ci, surtout que toutes les précédentes possèdent tellement d’arguments en leur faveur, que ce morceau-ci semble presque comme une faute de goût. Et puis pourquoi appeler un titre The Last Haven (outro), s’il y a encore une plage qui suit ?? Une erreur qu’on leur pardonne.
Violon et piano nous entraînent dans des Echoes mélancoliques pour un instrumental qui repose le cœur et l’âme, et accessoirement vous permet de remettre vos cervicales en places, tant elles ont été sollicitées pour le headbanging effréné qu’appellent les morceaux de cette galette royale. Une façon intelligente de terminer un album. Encore une fois, le groupe nous entraîne là où on ne l’attend pas.
Pour ceux qui aiment le Metal avec chanteuses : TRIOSPHERE ; pour ceux qui aiment le Metal inventif : TRIOSPHERE ; pour ceux qui aiment le Metal technique : TRIOSPHERE ; pour ceux qui aiment le Prog par petites touches : TRIOSPHERE. Pour ceux qui … : TRIOSPHERE. Mis à part le petite erreur mentionnée, dont on peut facilement faire l’impasse. Un excellent album qui en ravira plus d’un et qui évolue dans un large spectre. Pour une route moins utilisée (The Road Less Travelled, suivez les gars, quoi), j’aime autant vous dire qu’on éprouve plus qu’une simple joie à se perdre dans les méandres de ce périple.
Mr Spok