On s’est quand même toujours interrogé sur l’utilité du départ de ZACHARY STEVEN de SAVATAGE, chanteur du groupe de 1992 à 2000, alors qu’il a poursuivi non seulement dans la même veine, mais aussi en faisant appel à JON OLIVA et CHRIS CAFFERY pour composer, en partie, le premier album de CIRCLE II CIRCLE. Une drôle de façon de quitter le navire pour finalement rester un peu dedans. CONSEQUENCE OF POWER est donc le troisième album du groupe qui s’offre à nous sur la table d’autopsie.
L’album commence par un Whispers In Vain. Et même si c’est avec un plaisir non dissimulé qu’on retrouve la voix du seigneur de CIRCLE II CIRCLE, d’emblée, le morceau ne convainc guère et une seconde écoute, même nécessaire, n’arrive pas à nous faire changer d’avis. La faute au ralentissement et à l’aspect assez mou de certains couplets peut-être. Heureusement que le solo de guitare de ANDY LEE, pour sa part, atteint des cimes, mais cela ne suffit pas pour sauver le titre. Dans le genre, le dernier JON OLIVA’s PAIN démarrait quand même mieux.
On n’a pas le droit de rater la plage titulaire, sinon, l’album est bon à jeter aux oubliettes. Et on se demande pourquoi ce n’est pas ce titre-ci qui ouvre les hostilités. Riff, break de batterie, rythmique d’enfer, voix magistrale et puissante, déroulement rapide. Les deux acolytes de la section rythmique MITCH STEWART (basse) et JOHNNY OSBORN (batterie, sans le ‘e’ et donc sans lien de parenté avec qui vous savez) s’en donnent aussi à cœur joie. Rien ne manque, c’est un véritable catalogue de ce qu’il faut à un titre pour mériter le qualificatif de ‘Metal’. Qui plus est Consequence Of Power ne traîne pas dans l’ombre de l’histoire du chanteur et possède une personnalité propre qui le distingue de l’univers de SAVATAGE. Et puis quand déboule le solo, c’est le bonheur assuré. Zappez donc la première chanson pour directement vous délecter de ce chef d’œuvre.
C’est un univers bien lourd qui vient envahir l’espace sonore avec Out Of Nowhere. Le tempo s’est ralenti, on a l’impression de retrouver ce brave RONNIE JAMES DIO, tellement le titre est Heavy. La voix est encore plus mise en avant que sur les morceaux précédents. A nouveau, le titre éclate lors du solo de la six-cordes, la vitesse modérée du titre permet aux notes de s’imposer dans l’espace, soutenu par une rythmique aussi discrète qu’efficace. Un exemple parfait d’un équilibre judicieux entre la voix, la guitare et le mur sur lequel elles viennent s’appuyer. Dans le langage artisan, on appelle cela une « leçon de savoir faire ».
Un morceau qui s’intitule Remember nous expédie des signes de ballade mélancolique, ce qui pour les réfractaires aux titres commerciaux tel moi-même, n’est jamais de bonne augure. Point du tout, s’il y a effectivement un air un rien mélancolique, on lorgne plutôt du côté des boissons énergisantes, sauf qu’ici, il n’y a pas des tonnes de produits chimiques. Les interventions de la batterie, claires, mais seulement légèrement en retrait par rapport au chant, s’inscrivent clairement dans une veine Prog. A croire qu’au mixage, il a été décidé de mettre JOHNNY OSBORN un peu en exergue. Captivant au possible, on se laisse emporter par la rythmique et le chant avant que ne déboule, sans crier gare, un solo aux sonorités un rien orientales du plus bel effet. Efficace du début à la fin.
Petite accélération pour l’introduction de Symptoms Of Fate, à nouveau c’est un mid-tempo qui s’impose, l’idéal pour permettre à la voix de STEVEN de se mettre en évidence, en modulant ses effets. Ce titre efficace souffre cependant un peu de suivre une série gagnante qui lui fait un peu trop d’ombre et il ne sort donc pas assez du lot.
Avec Mirage, on passe à autre chose, un riff, un peu « hendrixien » dans sa sonorité, nous ouvre l’appétit. Dès que le chant s’impose, ce riff s’éclipse pour laisser la place à un mur bien carré qui laisse la voix s’imposer magistralement jusqu’au solo de gratte. Un moment qui semble ne jamais s’arrêter et malgré le retour à l’avant-plan du chant par la suite, les doigts d’ ANDY LEE semblent avoir des fourmis dans les jambes et ne peuvent s’empêcher de parcourir le manche dans le sens des cordes (je concède, il n’y en pas d’autre). A croire que le gaillard s’est mis en pilotage solo automatique et qu’il n’a pas envie de revenir en mode rythmique. Ce Mirage n’a rien d’une illusion, c’est du tout bon !!
A croire que les musiciens en ont eu assez des tempos assez modérés des plages précédentes et qu’ils ont voulu se défouler, Episodes Of Mania nous livre un groupe qui garde le pied sur l’accélérateur, avec une voix qui varie énormément de l’intro, au premier couplet et au refrain. Bref, moduler les ambiances semble le mot d’ordre sur ce titre envoûtant. Est-il nécessaire de spécifier que le solo qui vient prendre sa place dans ce déferlement métallique vous ramone les pavillons auditifs à qui mieux mieux ?
Chassez le naturel, il revient au galop, et le riff de Redemption sent bon les effluves de SAVATAGE, ce qui rajouté à la voix nous plonge dans un univers bien connu et franchement agréable. Alors évidemment, l’originalité n’est pas vraiment la principale qualité de ce titre, mais si on lorgne plutôt du côté efficacité, on est largement servi. A noter aussi un petit break qui fleure le MAIDEN aux entournures, histoire d’introduire un solo clair au tempo modéré qui pousse ensuite sur le champignon.
C’est un piano discret qui introduit un Take Back Yesterday nettement mélancolique par sa mélodie et sa ligne de chant. Mais ce côté tempéré cède rapidement la place à un déferlement d’énergie qui puisse sa source dans une voix énergique soutenue par un rythmique très rapide. Le deuxième couplet clame aussi le jeu avant un nouveau déferlement de Metal en fusion. Quel bonheur de voir ainsi différentes ambiances réunies dans un seul morceau. Là où un groupe débutant se serait contenté d’une ballade sirupeuse au piano, CIRCLE II CIRCLE varie les plaisirs (et les nôtres par la même occasion) et nous offre un morceau à plusieurs dimensions. Magique.
Appeler un morceau du nom d’un autre groupe peut s’avérer un exercice périlleux car parfois, la comparaison va s’imposer au détriment du morceau lui-même. Ce n’est heureusement pas le cas ici. Et bien que moins efficace que les titres précédents, c’est-à-dire avec une personnalité moins marquée, Anathema ne souffre aucunement de la comparaison avec le combo du même nom. Mais par rapport aux précédents, il fait un peu pâle figure. L’album se termine par une jolie ballade judicieusement placée à la place qui permet de ne pas l’écouter pour ceux qui sont réfractaires à ce genre d’exercice devenu quasi obligatoire. La présence du piano rappelle la filiation évidente avec SAVATAGE.
En définitive, un excellent album qui porte encore, mais heureusement pas trop, les couleurs du vénérable passé du chanteur au sein de la bande de JON OLIVA. Et qui arrive, dans ses meilleurs moments, à s’en démarquer clairement. Une excellente surprise donc.
Mr Spok