Stratovarius - Elysium
earMUSIC

Le groupe finlandais a connu la consécration à l’époque de son guitariste fétiche Timo Tolkki qui a fini par mettre les voiles mais a laissé aux musiciens restants les droits sur le nom et le droit de jouer les titres en live. Bref, armé d’un nouveau guitaristes, Matias Kupiainen, les toujours présents Timo Kotipelto (chant), Jörg Michael (battterie), Jen Johansson (claviers), et Lauri Porra (basse) ont ouvert la deuxième vie du groupe avec l’album POLARIS sorti en 2009, une galette qui n’avait pas convaincu. Dès lors, c’est dubitatif que mon oreille s’est posée sur cet ELYSIUM.

Grosse nappe de clavier, riff sympathique, voix toujours aussi chaleureuse de Timo, construction classique, on voyage en terrain connu et … surprise, la sauce Darkest Hour prend. Les jambes se mettent à bouger à l’insu de mon plein gré, je tire sur ma tignasse pour que mes cheveux soient plus longs, histoire de délimiter un espace vital respiratoire suffisant en concert. La plage se veut directe, et le plaisir l’est tout autant. Le solo nous prend par surprise, la voix du chanteur retenti à nouveau sur le refrain. Démarrage sur des notes orientales, puis basse et chant occupent l’espace sonore pour les premières phrases de Under Flaming Skies. Les autres instruments se joignent au duo, le titre s’envole vraiment. Le brave Jörg martèle ses fûts sans répit, le guitariste se défoule sur son manche, les claviers nous créent une atmosphère sympathique. Un solo gentillet mais pas vraiment transcendant prend la relève avant que le refrain ne retentisse une dernière fois. Efficace.

Le chanteur, seul, entame Infernal Maze, le clavier est en retrait. La voix monte et le son se fait plus présent, comme un opéra. Ensuite, c’est un démarrage en trombe, tous les instruments se lancent dans la mêlée, le titre a décollé et c’est du tout bon. La guitare de Matias et le clavier respirent la forme, ça déboule dans tous les sens, chacun son tour, avec une proéminence pour le clavier de Jens. En clair, on a envie d’écouter la suite. Et cette suite s’appelle Fairness Justified, le titre opte pour un tempo lent et lourd, proche de la ballade, mais bien trop rempli d’énergie débordante pour faire croire à un slow. La guitare s’exprime en toute liberté, magnifiée par la vitesse modérée du morceau, le clavier rejoint le solo de guitare sur la fin. Une transition respiratoire du meilleur effet avant d’entamer la prochaine étape. Tel un bolide sur une ligne droite, The Game Never Ends se lance pour ne jamais ralentir. Formule connue mais toujours aussi efficace, la bande tient la forme et ça s’entend. La guitare carbure à fond en pole position, les claviers restent assez discrets jusqu'à leur solo phénoménal.

Ambiance feutrée, mélodie éthérée, Lifetime In A Moment commence en lenteur, la guitare rentre d’abord discrètement, puis lorsque la section rythmique donne enfin signe de vie, un déluge sonore s’abat sur nos oreilles. Le rythme, très lent, fait ressortir l’énergie contenue du riff, basse batterie accompagne un chant souvent seul. Un break à la basse avant le lancement des chœurs. Un morceau tout en ambiance qui fait mouche et qui offre un contrepied à ce qui précède. Petite incursion dans la ballade acoustique avec Move The Mountain magnifié par la voix de Timo Kotipelto et une ambiance mélancolique magnifiée par une douce nappe de clavier et des coups de batterie discrets mais judicieux. L’ambiance monte alors que le titre, loin de revenir à la ballade, bifurque vers l’épique, laissant le soin au piano de conclure.

Rentrée dans le vif du sujet dès les premières notes de Event Horizon. La batterie imprime un rythme soutenu, assisté par une basse et une guitare qui font sauter les radars. Le guitariste se démène comme un fou, six cordes et claviers se répondent sans arrêt comme dans un duel sans fin, à croire qu’ils ont oublié qu’il y a un chanteur dans le groupe. Hallucinant. Pièce maîtresse de l’album, et plage titulaire, Elysium s’ouvre sur une ambiance feutrée, un martèlement lent impulse un tempo carré dont l’énergie va peu à peu se déverser dans le courant du morceau. Le titre bifurque une première fois avant le solo de guitare, qui se verra bientôt suivi par un duo clavier-gratte. On nage en plein mid-tempo progressif à tendance symphonique. A nouveau, virage en épingle à cheveux, pour un second solo nettement plus agressif, le titre prend de la vitesse. La basse s’illustre sur le ralentissement qui suit, et le titre change encore d’ambiance, ouvrant une autre porte vers une dimension différente avant de replonger dans le bonheur de la vitesse et de l’énergie et on n’est même pas à la moitié du titre. Un premier break où les claviers prennent l’ascendance avant de céder la place à la guitare. La complicité entre les deux instruments relève du pur bonheur, et les autres ne font pas que de la simple figuration, le titre déménage un maxium. Elysium, souffle enfin sur une guitare sèche, bientôt rejointe par une voix à peine audible qui finit pas se poser doucement sur la mélodie. Le chant se fait plus puissant bientôt rejoint par des chœurs majestueux et des instruments qui marquent leur présence par un recours net à l’électricité. A nouveau un fabuleux solo de clavier avant que ne retentisse un refrain qui s’éternise jusqu’au solo de guitare final. Une grosse claque magistrale.

En conclusion, alors que depuis de longues années, les ennuis aidant, STRATOVARIUS n’était plus que l’ombre de lui-même et n’arrivait plus du tout à redémarrer, tel un Phénix, il renait de ses cendres. Gloire soit rendue au guitariste Matias Kupiainen pour avoir relevé le défi, et prouver qu’il y a encore une vie après Timo Tolkki. Et bravo aux autres musiciens pour avoir décidé de poursuivre l’aventure coûte que coûte. Cet album royal prouve que la persévérance finit par payer et que les musiciens, plutôt que de copier leur passé, osent aller de l’avant et s’aventurer dans des contrées jusqu’à présent inexplorées, la plage titulaire étant, à ce titre, particulièrement éloquente. Impossible d’oublier le passé bien sûr, mais la puissance de cet album est telle qu’il ne fait aucunement tâche dans leur discographie. Un véritable tour de force et une galette royale.

Mr Spok