Saltatio Mortis - Sturm Aufs Paradies
Napalm Records

Fondé en 2000, SALTATIO MORTIS est un groupe de Metal Folk allemand dont la devise est une invitation à la fête « Qui Danse, ne meurt pas ». En comptant les albums studio et les enregistrements captés en public, le groupe affiche donc déjà 10 galettes à son compteur. Au départ, des sonorités électroniques remplissent les chansons des teutons, puis le groupe alterne les disques électriques et acoustiques. Il finit cependant par laisser choir cette alternance et se concentre sur le genre qui nous intéresse finalement. Les changements d’orientation ont également entraîné une réorganisation du line-up du groupe suite aux traditionnelles « divergences de vue musicales ». Aujourd’hui, la formation compte six musiciens en son sein. Lasterbalk der Lästerliche, le batteur qui est aussi la tête pensante et principal compositeur du groupe. Le chanteur Alea der Bescheidene qui ne dédaigne pas s’emparer d’une guitare, d’une cornemuse, d’une chalemie (instrument à vent de la famille des hautbois originaire d’Espagne) voire d’un didgeridoo (instrument à vent des aborigènes d’Australie). Rayon folk, nous trouvons Falk Irmenfried von Hasen-Mümmelstein, qui ne dédaigne ni la cornemuse, ni la chalemie, ni la vielle à roue (lisez bien « vielle » et pas « vieille », le troisième âge n’a rien à voir dans cette histoire) quand il ne chante pas. De même El Silbador fait honneur à son nom à la cornemuse et à la chalemie. Tandis que le rayon Metal est assuré par Bruder Frank à la basse et Samoel à la guitare (et accessoirement à la harpe). Autre détail réjouissant, nos lascars chantent en allemand.

Première mesure en roulement de batterie avant que la guitare et les instruments folks n’interviennent pour lancer Habgier Und Tod. La voix prend alors l’ascendance pendant le premier couplet. Le refrain, un rien mélancolique, voit les instruments revenir à l’avant-plan. Le deuxième couplet est agrémenté de quelques judicieuses interventions qui ne viennent jamais couvrir la superbe voix de Alea. La mélancolie du deuxième refrain laisse la place à une accélération emmenée par les instruments folks. Du pur bonheur.

Gros son Metal Indus pour démarrer Hochzeitstanz. Sur le couplet la voix est particulièrement agressive. La cornemuse n’intervient qu’au refrain alors que le chant prend une intonation moins virulente. Par la suite, le chant se module passant d’un mode à l’autre. Un break très carré, le chant reste agressif, jusqu’à ce que l’électricité cède la place, pour un court instant, à la guitare acoustique.

Grosse tromperie avec cette Ode An Die Feindschaft. Le groupe nous prend en traître, avec ces douces sonorités folks, faisant croire qu’il s’agit de la ballade médiévale de rigueur. Et puis éclate la puissance d’un titre bien carré au riff acéré. L’équilibre entre les instruments purement Metal, la voix et les sons folks est parfait. Le titre a tôt fait de vous emporter jusqu’au break qui assiste à un ralentissement général qui met la voix en évidence. Avant que ça reparte comme en ’40 (et que donc ça emporte tout sur son passage : colonne vertébrale, cheveux, jambes). On en redemande.

On est servi par la flûte qui introduit une sympathique ritournelle moyenâgeuse : Eulenspiegel (aucun rapport avec Tijl de la culture flamande belge). La voix se pose de façon particulièrement tempérée sur ce superbe mid-tempo où l’électricité, bien que présente, ne sert que d’ossature à l’ensemble. De judicieux roulements de tambours accompagnent un refrain très chantant « na na na na na » (bon j’en ai peut-être oublié un ou deux dans le tas) qui nous fait penser à MÄGO DE OZ. Puis le chanteur reprend les rennes du titre pour le conduire à son final.

Gros riffs, duo rythmique basse batterie costaud, et cornemuse pour lancer Sündenfall. Le groupe use à nouveau du procédé qui consiste à mettre les instruments en sourdine lors du premier couplet. Le refrain voit l’ensemble des musiciens joindre leurs efforts à celui du chanteur. Le deuxième couplet s’enrichit d’un riff très aigu. Le titre a atteint sa vitesse de croisière. Des sons coupés bruts et nets pour annoncer le dernier refrain, le groupe termine le titre sur une note de cornemuse qui s’étire un rien.

Mélodie mélancolique à la cornemuse, soutenue par une rythmique rapide mais pas étouffante. Riffs très secs. Seuls des arpèges à la guitare accompagnent le chanteur jusqu’au refrain de Nachtigall Und Rose. Un break rempli de guitare, puis le titre adopte un tempo plus lent avant de repartir de plus belle jusqu’à une fin acoustique. Une conclusion qui permet la transition vers le titre suivant. C’est un clavier léger qui lance la ballade de rigueur Gott Würfelt Nicht, les instruments sont discrets, paradoxalement, la basse ressort mieux de ce fait. Pour le refrain, les guitares sont électrifiées mais pas trop présentes. La voix se fait de plus en plus puissante alors que le titre approche de sa conclusion, tandis que la cornemuse se positionne aussi au premier rang.

Introduction électronique pour Nach Jahr Und Tag, où la basse bourdonnante accompagne le chant avant qu’un riff ne rejoigne l’ensemble. Point d’orge sur la fin de l’intro, et tous les instruments se groupent pour le titre. La chanson fait ressortir l’équilibre entre ses quatre éléments : le chant, la rythmique basse-batterie, le riff de guitare et la mélodie folk à la cornemuse (à vous de savoir ce qui correspond à quoi : eau-terre-feu-air). Efficace mais un peu trop systématique dans l’utilisation d’une ‘formule’, formule qu’on retrouve tout autant sur Orpheus. Introduction calme au piano, et entrée en piste de tous les autres instruments. A nouveau, chaque couplet voit les différents sons soutenir le chant, ajoutant de-ci, de-là, une petite différence par rapport au précédent. Soulignons la mélodie à la cornemuse qui appelle à la fête et qui contrebalance l’impression mélancolique des notes de piano. A noter également, une voix féminine non crédité dans notre dossier de presse, ce qui n’est pas sympathique pour la chanteuse. Et qui est d’autant plus regrettable que ses interventions viennent élargir l’espace du titre.

On démarre en cornemuse puis en trombe avec les autres instruments pour Spiel Mit Dem Feuer. La foudre se calme pour laisser la place au chant et à des instruments très calmes avant un habituel refrain sous haute tension. Impossible de rester de marbre face à ce type de composition qui nous la joue sous le format montagne russe, on monte et on descend. Attachez vos cigarettes et éteignez vos ceintures, c’est parti pour un tour.

Ceux qui ont eu cours de Latin se réjouiront de ce Fiat Lux (aucun rapport avec un véhicule italien de standing). Rassurez-vous, il ne s’agit que d’une déclinaison de ce qu’on trouve déjà sur cette galette et non pas d’une leçon de grammaire romaine. Gros riffs, rythmique carrée, cornemuse, chant très varié, mélodie sympathique et entraînante. L’album se poursuit avec Der Letzte Spielmann où la cornemuse se taille la part dominante du titre. Captivante et entraînante, la chanson bénéficie d’une efficacité certaine grâce à la mélodie de l’instrument à vent. Difficile de ne pas réagir face à un tel refrain taillé pour faire la fête. L’album se termine sur la ballade Wieder Unterwegs, le tempo est lent et tempéré et même si l’électricité est de la partie, la vitesse est bannie à jamais de ce titre très mélancolique mais pas larmoyant.

Tout au plus reprochera-t-on au groupe d’utiliser un peu toujours le même type de structure pour ses chansons. Premier couplet avec peu d’instruments, tous entrent en scène pour le refrain et les couplets suivants. Passages feutrés et accélérations salutaires. La recette fonctionne très bien mais s’avère quand même un peu trop systématique. Ceci dit, là où IN EXTREMO peut s’avérer rébarbatif à cause de la voix bien rauque du chanteur Das letzte Einhorn (de son vrai nom Michael Rhein), SALTATIO MORTIS a tous les atouts pour séduire un plus large public, qui ne serait pas réfractaire au chant en allemand, grâce à la superbe voix du chanteur Alea der Bescheidene. Mais au niveau de l’inventivité et de la diversité, le groupe ne récolte que la mention « bien mais peut mieux faire ». L’album mérité cependant sa place dans la collection de tout fan de Metal Folk digne de ce nom.

Mr Spok